La pose de clôture sur un terrain privé à l’épreuve du droit de l’environnement : Quand le droit protège la circulation de la faune.

a close up of a barbed wire fence

Article par Ugo Ivanova

18 juin 2025

Commentaire du jugement du Tribunal administratif d’Orléans du 5 mai 2025 n° 2500168

Clore ta parcelle

Bien sur

A condition que la faune circule

A coup sur

Il est des lois qui font beaucoup de bruits et d’autres, tapies dans l’ombre du cénacle, qui ne suscitent que très peu d’enthousiasme. C’est précisément le cas de loi du 2 février 2023 n° 2023-54 qui a introduit un nouvel article dans le Code de l’environnement – L. 372-1 – duquel résulte des obligations spécifiques opposables aux propriétaires de terrains situés en zone naturelle ou forestière qui souhaiteraient implanter des clôtures sur leurs terrains.

Méconnaissance de la liberté individuelle pourriez-vous dire ? Le Conseil Constitutionnel n’est pas de cet avis. Cet article a été jugé conforme à la constitution en ce qu’il « ne méconnait pas la liberté d’entreprendre ni aucun droit ou liberté que la Constitution garantit » – Conseil Constitutionnel, décision n° 2024-1109 QPC du 18 octobre 2024.

La loi s’impose donc à tous les propriétaires qui souhaiteraient « engrillager » leurs terrains avec, comme principale obligation, la nécessité de déposer une déclaration préalable pour la pose de toutes clôtures – si tant est que le terrain se situe en zone naturelle et forestière – et la nécessite que la clôture soit posée 30 centimètres au-dessus de la surface du sol et que sa hauteur soit limitée à 1,20 mètres.

Elles ne doivent pas, à cet égard, « constituer des pièges pour la faune ».

Le sens de ces obligations s’impose d’elles-mêmes : préserver les équilibres écologiques et la libre circulation de la faune dans des zones particulièrement riches en biodiversité.

Il est d’ailleurs important de préciser que les propriétaires ont jusqu’au 1er janvier 2027 pour se mettre en conformité avec ces nouvelles dispositions.

Il n’a pas fallu attendre longtemps pour que le juge se saisisse de cette nouvelle loi, en témoigne le jugement rendu en date du 29 mai 2024 par le Tribunal judiciaire de Meaux aux termes duquel le juge judiciaire a ordonné la démolition d’une clôture édifiée en méconnaissance à la fois du plan local d’urbanisme et de l’article L. 372-1 du Code de l’environnement – Pour rappel, s’il appartient au juge administratif de juger de la légalité d’un ouvrage au regard des prescriptions opposables, c’est au juge judiciaire de connaître des demandes de démolitions d’une construction jugée irrégulière -.

Après le Tribunal judiciaire, c’est au tour du Tribunal administratif d’Orléans de connaître de ce nouvel article qui, à n’en pas douter, donnera lieu à bien d’autres décisions et contentieux.

Car en effet, si ce nouveau jugement traite des nouvelles dispositions qui s’imposent aux clôtures, ce n’est pas le fond de l’article L. 372-1 du Code de l’environnement qui est évoqué mais sa portée. Ou, pour être plus précis, l’autorité qui serait chargée de constater qu’une clôture est, ou non, concernée par ces dispositions.

Un propriétaire foncier demandait en effet à la Direction départementale des territoires (DDT) de constater que ses clôtures entourant sa propriété n’étaient pas concernées par l’article précité.

🛑Le Tribunal, saisi par le propriétaire suite au refus, de la DDT, d’attester d’une telle demande, indique « qu’il ne résulte d’aucune disposition législative comme règlementaire ni d’aucun principe général du droit que le représentant de l’Etat dans le département serait tenu de délivrer des certificats ou attestations de conformité aux propriétaires de terrains clôturés qui lui en feraient la demande au regard des dispositions issues de la loi susvisée du 2 février 2023 ».

Le refus est donc, de facto, insusceptible de recours en ce qu’il ne fait pas grief, la DDT ne pouvant connaître d’une telle demande.

Le propriétaire malheureux demandait également une telle attestation de conformité au Tribunal administratif lui-même.

Ce dernier jugeant alors qu’il n’entre aucunement dans ses attributions de constater la régularité des clôtures au regard de la législation applicable.  

Aucune autorité ne disposant donc de la compétence pour attester de la conformité – ou non – d’une clôture aux nouvelles dispositions commentées, chaque propriétaire concerné devra donc s’assurer, personnellement et par exemple au moyen d’un constat d’huissier, de la conformité de ses clôtures afin de ne pas subir, à l’avenir, un constat d’infraction au Code de l’environnement.

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